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 deux hippies sur le chantier de guerre!

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Claire Gretchen

Claire Gretchen

admin désabusée et toxico


Âge : 33
Emploi/études : Professeur de maternelle
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Commentaires : Laisse-moi vivre
laisse moi mourir.
Laisse moi être
et tu n'auras pas de poing sur la gueule.
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deux hippies sur le chantier de guerre! Vide
MessageSujet: deux hippies sur le chantier de guerre!   deux hippies sur le chantier de guerre! EmptyMer 11 Fév - 17:33

à quatorze-heure deux

par une belle journée d'hiver



J'ai en mains une bonne dizaine de fruits
parce que apparemment que c'est bon de boire régulièrement des smoothies plein de vitamines. C'est ce que les médecins à la télévision disent, et il faut toujours écouter la télévision, hein. Bon; vous demanderez qu'est-ce qu'une droguée dans mon genre en a à foutre des smoothies. Je dois admettre qu'après la quantité de kilo de mush ingéré dans ma vie, ce n'est pas mon alimentation qui me préoccupe. Non, je veux seulement arriver avec un breuvage santé tous les matins du semestre qui vient pour montrer le bon exemple aux enfants. C'est que c'est la semaine de la santé selon la commission scolaire qui dirige nostre établissement. Les règles sont les règles, que voulez-vous! Et deux petites grammes de plus d'ingérer dans mon décompte. De mush, pas de smoothie.

Si j'ingère la substance aussi rapidement, c'est que je reviens d'un petit magasin chinois miteux sur Mont-Royal et qu'au bout de la rue se dresse une série de flics avec leurs chiens stupidards bien dressés, la truffe en l'air. Et je me dis que, si je mets tout ce que j'ai sur moi d'illégal dans mon estomac, ces cabots ne pourront sentir le meilleur stock de Montréal dans mes poches. Je marche vers eux et, comme de fait, il ne se préoccupe pas de moi. Moi je devrais. Me préoccupé de moi. Je mastique rapidement et avale en manquant m'étouffer, de justesse, et me reste qu'à compter les minutes avant que le goût de merde ne s'échappe de ma langue et ne monte à ma cervelle. Bon, moi qui avait prévu faire de la correction de dessins aujourd'hui... c'est foutu.

Un cri de bête sur ma gauche. Je vois un policier retenir ce qui m'a tout l'air d'un hippie en furie. Je m'arrête au bord de la rue pour le regarder et attendre le bus à la fois. Je vois beaucoup plus de gens et de flics que prévu. Même que la montagne minuscule qu'est le Mont-Royal est couverte de combattants grouillants et de matraques à l'affut. Des pancartes font les fleurs de pavés un peu partout et gueulent « NON AU PLAN NORD » comme s'il s'agissait de la parole de l'Église Nouvelle. Mais contrairement à la religion, je suis pas contre. Non, je ne suis pas d'accord avec la déforestation d'autant de ressources naturelles pour la peut-être possibilité de quelques déficits budgétaires en moins. Je m'approche de la foule. Sauf que c'est pas pour manifester avec les autres - j'irai pas manifester avec une épicerie dans les mains - non c'est plutôt pour demander la route sera bloquée pendant combien d'heures et si l'autobus effectue un autre trajet pour le moment. J'aborde un policier avec mon air le plus séduisant qu'il n'y a pas:

« Hey, 'scuse. Toi, là... Yo... T'sais-tu quand est-ce que la bus 97 pourra me mener à De Lorimier? »

Le policier me regarde et s'en fou de moi carrément. Ça paraît. Il regarde la fille cernée à la teinture bâclée qui mastique la gueule grande ouverte comme une vache et qui postillonne à ses pieds des mots qu'il ne comprend sûrement pas en dessous de son casque à mille couches. Bon. Tant pis. Je vais marcher. Fait chier, merde. Je me retourne d'un sec coup puis on me pousse. Semblerait que j'ai foncé dans quelqu'un qui ne regardait pas, lui non plus, où il allait, visiblement. J'en laisse tombé un fruit de mon sac; le choc pousse mon cantaloup sur l'asphalte. Il roule comme s'il allait vers le soleil couchant en chantant la final de Lucky Luke.

« Non! Ma cantaloup! »

Merde, merde, merde de sainte-cochonnerie de gros tas de pénis mou. Adieu, Jack. Je ne t'oublierai jamais. Gaspillage. C'est triste. Au moins je sais toujours inventer des insultes pour la vie dans ma tête. Je me retourne vivement. C'est qui le con qui m'a poussée que je lui flanque le reste de mes fruits dans l'anus?! Je constate alors que je n'ai personne à blâmer, sinon la rébellion en soi. Quelqu'un vient de sortir une bombe fumigène, et j'ignore encore s'il s'agit d'un acte des hippies ou des policiers, mais une débandade apparaît autour de moi. On crie. On hurle. On se donne des coups. On court. On se débat. On bouscule. On massacre et on pleure. Et moi... moi je dois dire que j'en oublie mon sac de fruits.

Il y a, alors, un terrible son sourd et cru qui dévore le ciel. Je relève le menton à la recherche d'un missile à tête chercheuse mais mes rétines n'ont pas le temps d'envoyer la sensation des couleurs à mon crâne que je me sens poussée des mètres plus loin par un coup d'éclat vif et brûlant. Je tombe lourdement sur le sol en laissant un gémissement bondir de ma langue. J'ai mal. À l'épaule. Quel merdier. Aïe. Aïe, j'ai mal, putain. Je me redresse quand même et là je remarque que c'est un obus qui a éclaté pas loin où j'étais. Un obus?

Des coups de mitraillettes m'arrivent aux ouïes. C'est beaucoup de coups. Partout autour de moi. Ça tire. Ça crie, encore. Et ça souffre, beaucoup. Un jet de terre vole vers mon visage. Je suis sur les coudes, paralysée, je ne peux qu'empoigner le bout de mon chapeau pour me protéger les yeux d'un geste de réflexe. Mais ce n'est plus mon chapeau, c'est un casque de métal. Et le jet de terre à côté de moi, c'est le cadavre d'un soldat mort qui vient de tomber juste à ma gauche. Un cadavre de soldat, avec l'habit de guerre verdâtre et la tête d'un éléphant aux yeux exorbités qui puent le décès.

Je me relève d'un bond. C'est dégoûtant. Quelle horreur. Autour de moi, on lance un ordre et je vois plus loin une horde de soldats de vêtements marins accourir pour abattre l'ennemi qui bouge encore. Le ciel est gris comme la cendre des cadavres qui chlinguent autour de moi, et chacun de ces hommes de l'armée a une tête de chien. Des bergers allemands, des terriers, des labradors, chihuahuas, lévriers, pitbulls, boxers, bulldog, cockers... De n'importe quelle race! Ils jappent des ordres et bavent des sangles de rage. Répugnant! Je devine que je ne dois pas m'approcher d'eux. Mon lourd fusil bien en main, et mes culottes de camouflage campées dans mes bottes d'acier, je prends direction inverse. J'utilise le pas de course, même.

Je m'enfonce dans un troupeau de combattants à tête de girafe et tête d'éléphant. Ils gueulent tous les plus beaux mots de paix en se protégeant de coups de canif ou en frappant ce qu'ils peuvent pour défendre leur cher Nord. Ils sont fous, fous, fous... Et ils sont partout, bien plus que les chiens. On pourrait croire qu'ils ont déjà la victoire, mais je discerne bien moins d'armes de leur côté. Quelle malchance. Et puis... Et puis... Dans tout cela, je suis de quel côté? Un coup d'œil à mon linge vert. D'accord. Je suis du côté des hippies. Je sais pas trop si c'est bon ou mauvais signe, mais je me dis qu'à la guerre, on ne choisit pas son camp de toute façon. Je continue ma course. On m'agrippe l'épaule - celle qui fait mal, en plus! - et on me retourne. Je vois presque un sti-bernard me jeter je sais pas trop quelle merde en jet dans les yeux, mais j'ai le temps de lui tirer une bonne série de balles dans le ventre. En gueulant comme une démenée, en plus. Comme tout le monde autour de moi, en fait.

Je reprends le pas rapide en me retournant... Je réalise ensuite que je suis encore en vie! C'est malade. Bon. Je dois foutre le camp d'ici. Je ne veux pas me battre plus longtemps, je suis blessée. Je dois aller à l'infirmerie. Il y a une infirmerie dans les parages? Je sais pas. Je ne m'entends plus penser. Je ne fais qu'avoir, dans les oreilles, le son des obus qui planent dans le ciel et défoncent la terre, et la voix saccadé dans mon cerveau qui répète « faites qu'un machin me tombe pas dessus faites qu'un machin me tombe pas dessus faites qu'un machin me tombe pas dessus faites qu'un machin me tombe pas dessus... ».

Face à face avec quelqu'un. Je me redresse et tend mon arme, prête à tuer pour n'importe quel risque. À la guerre comme à la guerre! Puis je réalise qu'elle porte les mêmes vêtements que moi, celle que j'ai accrochée. Et c'est une jeune femme. Étrangement pas une éléphant. Ni une girafe. Non. C'est une magnifique antilope aux cornes robustes et symétriquement parfaites, avec des lignes noires et magnifiques sur le visage. Elle n'a pas d'arme, elle. J'imagine qu'elle veut s'en aller. D'ailleurs, je l'ai freinée dans sa course. Je cris, par dessus le chaos autour de nous, en mettant une main sur mon casque pour ne pas qu'il soit délogé de ma tête et en approchant de peu mon visage du sien:

« Je veux foutre le camp d'ici. Comment on fout le camp d'ici?! »

Clair et net. Non?

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